Je longe un couloir. L’adrénaline s’empare de moi. Ça faisait longtemps que je n’avais pas été à la télé. L’attaché de presse me suit, nerveux. Il fait sa job et moi, avec ma transparence, je risque de tout faire foirer. Je le comprends totalement car oui, trop de vérité peut faire dérailler un train en politique.
Ça prend un message uniforme, une cohésion parce que la politique, c’est avant tout une affaire de perception. Tout peut être interprété alors il faut suivre la recette à la lettre.
C’est un peu ce qui m’a écoeuré de la politique mais l’écosystème veut ça. C’est pour ça que le devant d’une boîte de céréales présente une belle image et un beau logo au lieu de la liste des ingrédients et leur valeur nutritionnelle. Ça en ferait déchanter une gang, sinon.
En 30 jours, on sème une confusion qui est un mélange de promesses, d’omissions, de propos tendancieux minant les navires adverses. Mais où se tient la vérité? Bah, on a quatre ans pour vous la dire, soyez patients.
Un journal titrait : Pablo Rodriguez rassemble son caucus pour répondre à Rizqy. Vraiment? En fait, on se rencontre pour s’entendre sur une version de l’histoire, celle qu’on racontera avec conviction et émotion afin de convaincre le plus de gens possible.
Et l’autre de QS qui se fait prendre les culottes à terre à courtiser le PQ mais qui dit au final qu’on ne l’a pas renvoyé, qu’il a quitté. Là, soudainement, il raconte son véritable calvaire… l’enfant-martyre. Comme le mari sale qui reproche mer et monde à sa femme et qui explique que son infidélité n’est pas la cause de leurs problèmes mais plutôt la conséquences de ceux-ci. La vérité est très souvent l’ennemie de la survie.
On ne sait pas trop ce qui est vrai, ce qui est faux. Les libéraux parlent de brownies en référence à un brun qu’on appelle aussi un billet de 100$. Pour ma part, ça ressemble plus à de la bullshit, sur la forme comme sur le fond.
Dans ce rallye de la perception, il est important de comprendre que tout est lié à des échéanciers, des étapes. On vous sert des promesses mal ficelées car on veut votre vote maintenant. On vous convaincra de la nécessité absolue d’un REM ou d’un tramway en évitant de vous parler de coûts d’entretien ou de remplacement parce qu’au fond, on veut que ça se fasse beaucoup plus qu’on veut que ça marche. Comme pour le stade olympique, on vous servira une rhétorique sentimentale, qu’on doit conserver et entretenir nos infrastructures et ainsi se sécuriser d’autres beaux contrats. On ne peut pas tout dire tout de suite. Ça prend un peu de suspense, non?
C’est pour les mêmes raisons qu’on nous vend une pléiade de trucs, d’une voiture à une laveuse, en passant par une tablette ou une télé. Des choses fondamentalement destinées à briser ou à être remplacées. Parce que c’est comme ça. Pour de nombreuses entreprises, sans bris, point de salut.
Parce qu’on préfère dire oui à une belle menterie plutôt qu’à une réalité qui fait appel à notre jugement et surtout, à notre sens des responsabilités.
Après tout, qui peut vraiment se blâmer de s’être fait avoir?