Lorsque j’ai joint une formation politique cet été en vue de l’élection municipale, on m’a d’abord offert le district de Limoilou. J’ai dit non, illico. Pour moi, le conseil municipal avait besoin de Jackie Smith. Je n’allais pas m’opposer à elle. Je sais, ça a l’air étrange à dire mais une démocratie saine est faite de vents contraires.

Le soir de l’élection, j’ai été tétanisé de voir que les Smith, Villeneuve, Melançon prenaient le chemin de la sortie. Le parti de Bruno Marchand devenait Québec Forte et Totalitaire.

La campagne menée par certains médias a trop marché. À vouloir endiguer toute opposition au tramway, leur cabale a endigué toute opposition tout court… ou presque. Les gens ont voté pour qui on leur a dit de voter pendant tout l’été. Trouvez-moi un seul papier ou reportage télé challengeant un tant soit peu Bruno Marchand. Nada.

Quand je vois Karine Gagnon du Journal de Québec titrer « Enfin, tout redevient possible pour Québec », j’ai peur. Très peur. QFF n’était-il pas majoritaire à l’Hôtel de Ville? Où était le problème? À l’ère de l’instantanéité, on doit occulter tout débat? Va-t-on bannir le mot opposition? On devra maintenant jouer à Bruno dit… et se croiser les doigts en espérant qu’il ait raison à chaque fois? Si les leaders médiatiques et d’affaires de Québec voient en cette nouvelle réalité un scénario rêvé, on se retrouve plutôt face à un important problème de représentativité, après tout, 51% des votants ont appuyé quelqu’un d’autre que le maire sortant. Ça ne se reflète pas du tout au conseil municipal.

Il reste un petit bataillon qui a survécu à l’hécatombe. Le régiment du soldat Lachance. Je connais le type depuis plusieurs décennies. Un conservateur mais vraiment pas un fou. Un gars articulé qui provoque des débats. Pas parfait mais qui l’est? L’heure n’est pas à l’hyper-sélectivité car c’est lui et deux de ses collègues qui sont là. Ils ont mérité leur privilège de gagner terre après une tempête quotidienne de 40 jours, évitant de chavirer in extremis plus d’une fois.

Mais non. On souhaite que le DGE fasse enquête afin que deux membres du régiment soient empêchés pour des années de toute possibilité de se faire élire, peu importe le palier de gouvernement. Pour avoir fait quoi? Pour avoir discuté de qui ferait quoi advenant la fusion de deux partis politiques, pas acheter quelqu’un pour s’en débarrasser. Il y a une importante nuance. C’était dans le but de continuer de travailler ensemble. C’est pas le genre de choses qui se négocient une fois mariés.

Mais non. On souhaite un univers de licornes bienveillantes où tout est rose… tiens, je l’ai ! Le film Barbie. Un monde idéal où chaque séance du conseil se transforme en une chorégraphie, une illusion de démocratie, une simple formalité bien actée de tout ce qui aura été décidé au deuxième étage. A-t-on besoin de ce 20% d’indécrottables?, pour paraphraser un proche collaborateur de l’administration actuelle. Et je crois qu’on a tous compris, si on se fie à la campagne, que bien des scribes vont suivre le courant Marchand.

Et nous, les citoyens?

Vous avez voté. Vous aviez juste à y penser. Tant pis pour vous.

Stéphane Lachance et Marc Roussin seront ce qui restera de la démocratie et de l’échange des points de vue à Québec. Sans quoi, une culture de l’infaillibilité s’installera peu à peu et où les gens qui oseront prendre la parole seront pointés du doigt, traités d’avocats de l’inertie, d’intimidateurs et de contre-productifs.

Veut-on vraiment d’un parti unique? Ne dénonce-t-on pas des pays qui valorisent de système?

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